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125 C - 1/81 - Berufungskammer der Zentralkommission (Berufungsinstanz Rheinschiffahrt)
Date du jugement: 24.02.1981
Numéro de référence: 125 C - 1/81
Type de décision: Urteil
Language: Français
Juridiction: Berufungskammer der Zentralkommission Straßburg
Section: Berufungsinstanz Rheinschiffahrt

CHAMBRE DES APPELS DE LA COMMISSION CENTRALE POUR LA NAVIGATION  DU RHIN

ARRÊT

du 24.02.1981

(rendu en appel d’un jugement du Tribunal pour la Navigation du Rhin de Strasbourg du 11 février 1980 - 3 c 1443/76)


La C.F.N.R. est armateur du convoi poussé composé du pousseur "Lyon" poussant en flèche la barge "C.F.N.R. 523" et en tête "S" à tribord de laquelle était amarrée la barge "S". Ce convoi navigant à la remonte sur le Grand Canal d’Alsace pénétra, le 15 février 1976, dans l’écluse de Marckolsheiffle. Il était conduit par le capitaine MOSTER qui avait placé à l’avant de la barge de tête bâbord (« S ») le timonier FERREIRA. Le capitaine REMBAULT faisait partie de l’équipage de repos.

En pénétrant dans le grand sas de l’écluse de Mairekolsheim, la barge "S" a endommagé les bois de protection situés rive gauche de l’entrée aval du grand sas. Lors de l’accident, la barge "S" subit également des dommages.

L’EDF, estimant que le conducteur du pousseur "Lyon" a utilisé les poutres de protection situées à l’entrée des écluses comme poutres de guidage, en s’y appuyant,  alors qu’il s’agit uniquement de bois de protection, demande au Tribunal pour la Navigation du Rhin de déclarer la C.F.N.R. seule et entièrement responsable des suites dommageables de cet accident.

La C.F.R.N. résiste à la demande en soutenant que c’est la barge "S" qui a été endommagée par un sabot métallique prolongeant une poutrelle de l’estacade en bois menant au bajoyer qui faisait saillie et se ficha dans la tôle de levée avant de la barge "S". Soutenant que l’accident est ainsi exclusivement imputable à une défectuosité des installations de l’EDF, la C.F.N.R, conclut au débouté de la demande et sollicite, par voie reconventionnelle, la condamnation de l’EDF au paiement d’une somme de 600 francs pour avoir été obligée à exposer des frais et débours et à effectuer des démarches non répétibles.

Le dommage de la barge ainsi que les dommages occasionnés à l’écluse ont fait l’objet d’expertises contradictoires.

 Le   Tribunal   pour   la  navigation   du  Rhin  de  Strasbourg   a  rendu le   11   février   1980  un   jugement   dont   le   dispositif   est   ainsi conçu:

LE   TRIBUNAL

Statuant publiquement, contradictoirement  et en premier ressort, à la fois sur la demande principale et la demande reconventionnelle,

- Dit et juge que la C.F.N.R. est seule et entièrement responsable des suites dommageables de l’accident survenu le 18 février 1976 dans l’entrée aval du grand sas des écluses de Marckolsheim;

En conséquence:

- CONDAMNE la C.F.N.R. à payer à l’EDF la somme de 5.494,00 francs avec les intérêts, au taux légal à compter du présent jugement,

- la CONDAMNE en outre à payer à la demanderesse la somme de 1.000 francs par application de l’article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,

- DEBOUTE la demanderesse de ses conclusions plus amples ou contraires,

- DEBOUTE la C.F.N.R. de sa demande reconventionnelle,

- FAIT masse des frais, dit qu’ils seront supportés par la C.F.N.R. défenderesse,

- DIT n’y avoir lieu à exécution provisoire du présent jugement.

Par acte du 30 avril 1980, signifié au Tribunal pour la navigation du Rhin de Strasbourg le 2 mai 1980, la C.F.N.R. a interjeté appel du jugement du 11 février 1980, signifié le 11 mars 1980, en déclarant expressément porter l’appel devant la Commission Centrale pour la navigation du Rhin.

Par mémoire ampliatif du 30 mai 1980 la C.F.N.R. soutient que la signification du jugement du 11 février 1980 à elle délivrée devait être considérée comme nulle car elle ne contenait pas les mentions prescrites, à peine de nullité, par l’art. 680 du Nouveau Code de procédure civile; qu’en l’espèce, la signification contient non seulement des mentions erronées en indiquant que l’appel "doit être fait soit à la Commission Centrale pour la navigation du Rhin... soit au Tribunal Supérieur de la navigation du Rhin...", mais elle a omis de préciser les modalités de l’appel en s’abstenant de préciser que celui-ci doit résulter d’une déclaration faite au Tribunal pour là navigation du Rhin et être accompagné pour la Commission Centrale de la déclaration expresse que l’on entend recourir à sa décision;dans ce dernier cas, l’appel doit également être formulé auprès de la partie adverse; qu’il s’ensuit que la signification étant nulle, le délai d’appel prévu à l’art. 37 de la Convention de Mannheim, n’a pas couru et que,partant,l’appel est recevable.
 
La C.F.N.R. soutient encore que c’est à tort que le premier juge admet que l’EDF bien que non propriétaire des installations, soit habilitée à poursuivre la réparation du dommage en vertu de la Convention du 11 août 1970 et du Cahier des Charges des écluses alors que l’Autorité concédant, en l’espèce l’Etat, doit être regardée comme immédiatement propriétaire des installations édifiées par l’E.D.F et ne saurait abandonner à quiconque le droit d’exercer les actions concernant le domaine public, nonobstant le fait que le concessionnaire est tenu de remettre en bon état d’entretien les installations, propriété de l’Etat.
En ce qui concerne les responsabilités encourues, la COMPAGNIE FRANÇAISE DE NAVIGATION RHENANE fait valoir que c’est la barge "S" qui a été endommagée par un morceau de ferraille qui dépassait les installations de l’écluse et qui a percé la coque de cette barge, alors que le convoi pénétrait normalement dans l’écluse; que l’accident est ainsi exclusivement imputable a une défectuosité des installations de l’EDF que  le   premier juge a payé tribut à l’erreur en écartant les dépositions des témoins FERREIRA, timonier, et MOSTER, capitaine et en se basant uniquement sur "les conclusions de l’expert Monsieur SAMIE" alors qu’il est établi que M. SAMIE n’a pas constaté l’état de l’estacade lors de la pénétration du convoi poussé dans le sas; que si l’E.D.F. ne rapporte pas la preuve que l’endommagement des installations a été causé par la C.F.N.R., cette dernière, par contre, rapporte la preuve, par des témoins régulièrement entendus, que le sabot de l’estacade présentait des défectuosités. Enfin l’E.D.F. n’est pas en mesure d’établir l’existence d’une faute du convoi; qu’en fait il est incontesté que le convoi s’est pré-sente dans l’axe du sas qu’en tout cas, aucun élément du dossier n’établit une faute; que ne peut davantage être considéré comme tel le fait que le convoi aurait pris appui à l’avant tribord sur l’estacade et le tribord; que c’est donc à tort que le premier juge a retenu la responsabilité de la C.F.N.R.
La Compagnie fait encore valoir que l’assignation manifestement dépourvue de fondement l’expose à des frais, débours et démarches non répétibles dont il n’est pas équitable qu’ils demeurent à sa charge de sorte que l’E.D.F. doit être condamnée à payer à ce titre une somme de l.500 francs.

Au soutien de ces moyens la C.F.N.R. demande à ce qu’il plaise à la Commission Centrale pour la Navigation du Rhin :

- INFIRMER le jugement dont appel,

- DEBOUTER l’E.D.F, de sa demande,

- CONDAMNER l’E.D.F. à payer à la C.F.N.R. une somme de l.500 francs avec intérêts de droit à dater de l’assignation.

- La CONDAMNER en tous les frais et dépens de l’instance.
 
L’EDF dans son mémoire en réponse du 18 juin 1980, déposé au greffe du Tribunal le 20 juin suivant, allègue tout d’abord que l’appel, signifié le 2 mai 1980, est tardif, le délai d’un mois indiqué dans l’acte de signification du jugement étant écoulé depuis le 11 avril; que l’appel doit dès lors être considéré comme irrecevable;

QU’elle fait valoir à cet égard que l’acte de signification par huissier ne saurait être tenu pour nul puisque l’huissier a pris soin d’indiquer que l’appel pouvait être porté, au choix de l’appelant, soit devant la Commission Centrale pour la Navigation du Rhin, soit devant le Tribunal Supérieur de la navigation;

QUE s’il est vrai que l’huissier s’est abstenu de préciser que l’appel doit résulter d’une déclaration faite au Tribunal de la navigation du Rhin, il n’est pas moins évident que cette abstention ne pouvait faire grief à l’appelante qui était représentée en première instance par un avocat, lequel avait reçu signification du jugement dès le 20 février 1980 par acte du palais; que le mandataire ad litem de la C.F.N.R. ne pourra pas faire accroire qu’il ignorait que l’appel devait résulter d’une déclaration faite au Tribunal pour la navigation du Rhin;

Qu’elle soutient encore que si l’art. 693 du nouveau Code de procédure civile sanctionne par la nullité ce qui est prescrit par les articles 654 à 658, 663 à 665, 675, 678, 680, 683, 684, 686, 689 à 692 dudit Code, il n’en est plus de même en ce qui concerne l’art. 932 qui prévoit que, dans la procédure sans représentation obligatoire, l’appel est formé par une déclaration que la partie ou tout mandataire fait ou adresse par courrier recommandé, au Secrétariat de la juridiction qui a rendu le jugement;

QUE la Commission Centrale pour la Navigation du Rhin ne pourra, dans ces conditions, que rejeter pour tardiveté l’appel interjeté par la COMPAGNIE FRANÇAISE DE NAVIGATION RHENANE.

L’ELECTRICITE DE FRANCE, reprenant les moyens qu’elle a déjà exposés en première instance, estime qu’elle a bien qualité pour exercer en son nom propre et en vertu d’un droit qui lui est propre l’action en dommages-intérêts dirigée contre la C.F.N.R.

En ce qui concerne  la responsabilité de la C.F.N.R., l’EDF fait siens les motifs du jugement de 1ère Instance en invoquant essentiellement le rapport d’expertise contradictoire établi à la suite de l’accident, la déposition ambiguë du capitaine REMBAULT, celle non moins contradictoire du timonier FERREIRA et le comportement suspect du capitaine du convoi qui a omis de signaler l’accident ainsi que le règlement de police lui en faisait obligation.

Enfin l’EDF estime que des errements procéduriers de la C.F.N.R. l’obligent une nouvelle fois à plaider ce dossier devant la Commission Centrale pour la Navigation du Rhin ce qui justifie l’allocation d’une indemnité de 2.500 Francs au fondement de l’art. 700 du nouveau Code de procédure civile.
 
Au soutien de ces moyens l’EDF demande à ce qu’il plaise à la Commission Centrale :

- DECLARER irrecevable, subsidiairement mal fondé, l’appel interjeté par la C.F.N.R. à l’encontre du jugement prononcé du 11 février 1980 par le Tribunal pour la Navigation du Rhin de Strasbourg.
En conséquence,

- DEBOUTER la C.F.N.R. de ses fins et conclusions,

- la CONDAMNER en tous les frais et dépens,

- la CONDAMNER sur le fondement des dispositions de l’art. 700 du nouveau Code de procédure civile à payer à l’EDF une indemnité de 2.500 francs assortie des intérêts de droit.

EXPOSE DES MOTIFS:

VU les pièces de la procédure, les documents régulièrement communiqués et produits aux débats, ensemble le jugement entrepris et les mémoires des parties auxquels la Chambre des Appels se réfère en tant que de besoin, pour plus ample exposé des faits et moyens.

ATTENDU que, par acte du 30 avril 198O, signifié au Tribunal pour la navigation du Rhin de Strasbourg le 2 mai 198O, la COMPAGNIE FRANÇAISE DE NAVIGATION RHENANE a interjeté appel du jugement du 11 février 1980 signifié le 11 mars suivant en déclarant expressément porter l’appel devant la Commission Centrale pour la Navigation du Rhin.

ATTENDU que l’appel ayant été formalisé hors délai, il appartient à la Chambre des Appels d’examiner, in limine litis, si l’appel interjeté est recevable.

ATTENDU qu’il résulte de l’art. 37 de la Convention de Mannheim que "si l’appel doit être porté devant la Commission Centrale, il sera signifié au tribunal qui aura rendu le jugement de 1ère Instance dans les trente jours à partir de la notification de ce jugement légalement faite suivant les formes adoptées dans chaque Etat. Cette signification sera accompagnée de la déclaration expresse que l’on entend recourir à la Commission Centrale. Elle sera faite également à la partie adverse au domicile élu en Instance ou, à défaut d’élection de domicile, également au Tribunal. La signification au tribunal aura lieu d’après le mode indiqué par les lois du pays";

QU’aux termes de l’art. 680 du nouveau Code de procédure civile, "l’acte de notification d’un jugement à une partie doit indiquer de manière très apparente le délai d’opposition, d’appel ou de pourvoi en cassation dans le cas ou l’une de ces voies de recours est ouverte, ainsi que les modalités selon lesquelles le recours peut être exercé";

ATTENDU, en l’espèce, que l’acte en date du 11 mars par lequel Me BENMANN,huissier de justice à Strasbourg, a signifié à la C.F.N.R. le jugement rendu le 11 février 1980 par le Tribunal pour la navigation du Rhin de Strasbourg énonce:

"Vous avez la possibilité d’interjeter appel contre ce jugement et ceci dans un délai d’un mois à compter de la date indiquée en tête du présent acte. Il doit être fait soit à la Commission Centrale pour la Navigation du Rhin siégeant au Palais du Rhin à Strasbourg, soit au Tribunal Supérieur de la Navigation du Rhin siégeant à la Cour d’Appel de Colmar. Ce jugement a préalablement été signifié à votre avocat par acte du Palais"

ATTENDU qu’il y a lieu de relever, tout d’abord, que l’acte de signification délivré par l’huissier de justice comporte, d’une manière très apparente, et l’indication du délai d’appel et l’indication que l’appel peut être porté, au choix de l’appelant, soit devant la Commission Centrale pour la Navigation du Rhin, soit devant le Tribunal d’appel pour la navigation du Rhin, formalités substantielles destinées à renseigner celui à qui la notification est faite sur l’étendue de ses droits.

ATTENDU cependant que dans l’acte de signification, l’huissier a omis de préciser que l’appel doit résulter d’une déclaration faite au Tribunal pour la navigation du Rhin et être accompagné, pour la Commission Centrale de la déclaration expresse que l’on entend recourir à sa décision et que dans ce dernier cas, l’acte doit également être signifié à la partie adverse.

ATTENDU à cet égard, que si l’omission de ces précisions entraîne, du moins en principe, la nullité de la signification délivrée par l’huissier de justice, il n’en est plus ainsi lorsque l’absence de cette formalité n’a pu faire grief à l’adversaire qui était représenté en 1ère Instance par un avocat, auquel le jugement avait été préalablement signifié par acte du Palais;

QU’il apparaît en effet, que pour invoquer l’art» 680 du nouveau Code de procédure civile, la justification d’un grief est requise, mais que ce grief ne découle pas nécessairement de ce que l’acte de notification ne comporte pas toutes les énonciations qu’implique ce texte; qu’il en est surtout ainsi lorsque l’absence de certaines mentions n’est pas de nature à faire grief aux intérêts d’un adversaire averti et bien con¬seillé et dont le mandataire avait d’ailleurs reçu signification du jugement dès le 20 février 1980 par acte du Palais; qu’au surplus la justification d’un grief n’est ni prouvée ni mime alléguée par l’adversaire; qu’il s’ensuit, en l’espèce et eu égard aux circonstances ci-dessus relatées, que la signification du jugement effectuée par l’huissier strasbourgeois n’est pas nulle au seul motif qu’elle ne mentionne pas que l’appel doit résulter d’une déclaration faite au Tribunal qui a statué en première instance;

ATTENDU dans ces conditions et sans qu’il soit besoin d’examiner le bien fondé de l’appel, qu’il y a lieu de le déclarer irrecevable pour n’avoir pas été formalisé dans le délai de trente jours prévu à l’art.37 de la Convention de Mannheim;

ATTENDU que la C.F.N.R. qui succombe subira la charge des entiers frais et dépens et, sans pouvoir elle-même prétendre à un quelconque montant en application de l’art. 700 du nouveau Code de procédure civile, sera condamnée en outre à payer à ce titre une somme de 2.500 francs à l’EDF avec les intérêts au taux légal.
 
PAR CES MOTIFS:

La Chambre des Appels de la Commission Centrale pour la Navigation du Rhin 

DECLARE irrecevable l’appel interjeté par la C.F.N.R. à l’encontre du jugement prononcé le 11 février 1980 par le Tribunal pour la navigation du Rhin de Strasbourg,

En conséquence

- la CONDAMNE en tous les frais et dépens,

- la CONDAMNE à payer à l’EDF par application de l’art. 700 du nouveau Code de procédure civile, une somme de 2.500francs avec les intérêts au taux légal,

- DIT que les frais sont à liquider conformément à l’art. 39 de la Convention révisée pour la navigation du Rhin, par le Tribunal pour la navigation du Rhin de Strasbourg.