Jurisprudentiedatabank

87 Z - 21/78 - Berufungskammer der Zentralkommission (Berufungsinstanz Rheinschiffahrt)
Datum uitspraak: 29.11.1978
Kenmerk: 87 Z - 21/78
Beslissing: Urteil
Language: Frans
Rechtbank: Berufungskammer der Zentralkommission Straßburg
Afdeling: Berufungsinstanz Rheinschiffahrt

CHAMBRE  DES APPELS DE  LA COMMISSION  CENTRALE  POUR  LA NAVIGATION  DU  RHIN

ARRÊT

du 29.11.1978


EN FAIT:

ATTENDU que dans la matinée du 19 novembre 1974 le remorqueur "„B“", dont le Port Autonome de Strasbourg  est  l’armateur et qui était conduit par son capitaine "S", avait pris en charge la barge "„S“", dont la CFNR était le propriétaire, pour la placer entre les ducs d’Albe du ponton de déchargement de la société "SO" dans le port de Strasbourg.

QU’au cours de la manoeuvre, selon la demanderesse, le remorqueur a, en voulant redresser la barge, poussé cette dernière contre la passerelle de l’appareil de chargement sud de la"SO" qui a ainsi été endommagée.

QUE le coût de la réparation de la passerelle endommagée s’élevait à 15.067,50 F y compris la TVA (Taxe à la valeur ajoutée) de 2.511,25 F, montant payé par la CFNR, laquelle a été subrogée dans les droits de la "SO".

ATTENDU que les défendeurs font valoir en vain que le choc contre la passerelle n’a pas pu se produire au cours de la manoeuvre effectuée par le remorqueur, mais qu’il s’est produit ultérieurement au cours d’une manoeuvre de déhalage qui avait été entreprise pour les besoins du chargement de la barge.

ATTENDU que le tribunal de première instance a entendu les témoins cités par les parties, dont les explications étaient partiellement contradictoires, mais que sur la base de ces témoignages, l’expert judiciaire et assermenté Albert Stahl nommé par décision du 2 février 1977, a claire ment exposé dans son rapport du 11 octobre 1977.
 
QU’il est donc hors de doute,

QUE la barge n’a pu heurter et endommager la passerelle au cours des manoeuvres de déhalage effectuées par le personnel de la "SO", déhalage qui ne peut se faire que parallèlement au quai en prenant appui sur les pieux et ducs d’Albe distants d’environ 60 cm. du quai.

QUE la barge a effectivement heurté et endommagé la passerelle en subissant elle-même des dommages,

QUE l’endommagement de la passerelle n’a pu être causé que par  une position oblique de la barge,

QUE le point de choc relevé sur la barge, et contesté par personne, prouve à l’évidence que la barge ne pouvait être amarrée sur le duc d’Albe à ce moment, ce dernier étant distant de 23 m.,

QU’il est donc hors de doute que le remorqueur "„B“" à lui seul ne disposait pas des moyens requis pour assurer un déplacement correct et précis de la barge.

ATTENDU que les parties ne mettent en doute ni la sincérité des dépositions des témoins ni le rapport de l’expert judiciaire,

QU’il ne s’impose donc pas à la Chambre des Appels de procéder elle-même à une nouvelle audition des témoins ou à ordonner une expertise;

ATTENDU que les défendeurs et appelants basent leur objection principale uniquement sur des contradictions que révélerait la con-frontation des dépositions des témoins Richard ROEHM matelot sur le remorqueur le jour de l’accident et "SI", bargier de la barge "„S“", avec les explications de l’expert Stahl, mais que la Chambre des Appels ne peut pas découvrir de contradictions susceptibles d’ébranler les explications et constations de l’expert Stahl;

QUE les dépositions du témoin ROEHM ("... A aucun moment je n’ai constaté la barge heurter sur la passerelle du poste de chargement Sud de la "SO"...") et du témoin "SI" ("... A aucun moment au cours de ces manoeuvres je n’ai constaté de choc entre la barge et une partie quelconque de l’appareil Sud ...") la première douteuse et la seconde a été partiellement rectifiée par le témoin "SI", qui déposait:
"Il est cependant possible que sans que je l’ai remarqué, la barge ait heurté en frôlant la passerelle. Je tiens toutefois à préciser qu’il est également possible que la barge ait heurté la passerelle en cours de déhalage pour les besoins du chargement";

QUE les témoignages des autres témoins, tous interrogés également le 25 mai 1976, a savoir une année et demi après l’incident, ne confirment pas les dépositions de "RO" et "SI" ; qu’au contraire le témoin "LA", employé de la "SO", précisait lors d’un deuxième interrogatoire du 25 novembre 1976 que la barge "„S“" n’a pas été déplacée par le treuil entre le moment de sa mise en place par le remorqueur et le début de son chargement par la "SO";

ATTENDU que l’expert Stahl, dans son rapport, s’est clairement expliqué sur les témoignages "RO"et "SI" et qu’il s’est efforcé de démontrer l’impossibilité des manoeuvres décrites par l’un de ces témoins (Roehm), démonstration ne laissant aucun doute et menée sur la base de la situation du lieu de l’incident de sorte que la Chambre des Appels peut, sans hésitation, se fonder sur les explications claires et convaincantes de l’expert Stahl. Que cet expert s’est également prononcé sur l’impossibilité des manoeuvres décrites par le témoin "SI":

"Là encore je me dois de préciser qu’il est impossible que la barge ait pu heurter la passerelle au cours des manoeuvres de déhalage, les ducs d’Albe et pieux étant distants d’environ 60 cm du quai".

ATTENDU que sur la base de ces constatations de fait le Tribunal de 1ère Instance a, à juste titre, retenu que l’abordage s’est produit au cours de la manoeuvre effectuée par le remorqueur, qui, à lui seul, ne disposait pas des moyens requis pour assurer un déplacement correct et précis de la barge, opération qu’il s’est chargé d’exécuter.

ATTENDU que, sur le moyen subsidiaire de l’appel, la Chambre des Appels s’est persuadée par les documents produits, que la société CFNR était en mesure de compenser la TVA payée sur la facture de réparation pour la passerelle endommagée de 2.511,25 F avec la TVA qu’elle a dû payer sur ses propres services.

EN DROIT:

ATTENDU que l’appel interjeté par les défendeurs est régulier en la forme et conforme aux prescriptions de la Convention de Mannheim;

ATTENDU que le Tribunal de 1ère Instance a, à juste titre, retenu la responsabilité in solidum de l’armateur du remorqueur "„B“" et de son conducteur pour l’abordage et le dommage causé par négligence dans la conduite du remorqueur, en vertu de l’article 3 du Binnenschiffahrtsgesetz et des articles 1382 et 1200 ss, du Code civil;

QUE la responsabilité de l’armateur a été limitée par le Tribunal de 1ère Instance à la valeur du remorqueur au jour de l’accident, et que cette limitation ayant été invoquée par la demanderesse dans son assignation n’est pas attaquée;

ATTENDU qu’il est incontesté que la demanderesse a versé en remboursement des dommages un montant de 15.067,50 Frs comprenant la TVA de 2.511,25 Frs;

Mais ATTENDU qu’il ressort du dossier que la demanderesse subrogée dans les droits de la "SO", a récupéré le montant de la T.V.A. qu’elle a payé;

ATTENDU qu’il est un principe de la responsabilité civile de rétablir, aussi exactement que possible, l’équilibre détruit par le dommage, de remettre la victime aux dépens du responsable, dans la situation où elle se trouvait si l’acte dommageable ne s’était pas produit et que l’on lui rend l’équivalent exact de ce dont l’a privée l’acte domma-geable, ni moins, ni plus (Savatier : Traité de responsabilité civile, tome II, N°601 (1939 juglart: Droit civil, 4ème éd., Obligations Vol. I, 622);

ATTENDU qu’il est constant en France, le droit français s’appliquant en l’espèce, qu’un commerçant ou industriel soumis à la T.V.A. et dès lors en mesure de compenser la T.V.A. payée sur les prestations qui lui ont été fournies avec la T.V.A. qu’il doit sur ses propres prestations, pour autant qu’une telle ompensation lui soit possible, ne peut pas exiger au titre de dommages et intérêts que le responsable des dommages qu’il a subi lui verse encore une fois la T.V.A.;

QU’UNE telle indemnisation de la T.V.A. aurait pour effet de constituer au bénéfice de la demanderesse un enrichissement sans cause puisque ce dernier ne supporte pas définitivement la charge de la TVA;

QUE le principe ci-dessus est admis tant par la doctrine (Lamy fiscal n°98; La T.V.A. et le règlement des sinistres -Janine Bauer Lefranc-pages 24 et s.Ed.AGSAA) que par la jurisprudence française (Cassation 1er ch. civ.- 9 février 1972 Cie des Assurances Générales ; Cassation 1er ch. civ. 28 janvier 1975 Cie Assurances Seine et Rhône/ Cie Assurance Générale Helvetia et autres) et réaffirmé  à plusieurs reprises par le Gouvernement français en réponse à des questions posées au cours de débats parlementaires (Réponse ministérielle notamment du 29 octobre 1970) - Débats Assemblée Nationale page 4882 n° 12746) et du 2 mai 1971 (Journal Officiel - Débats annuels page 1608 n° l6.327);

QUE pour ces motifs, le montant du dommage réclamé doit être calculé sans tenir compte de la T.V.A. de 2.511,25 F, et les défendeurs ne pourront être condamnés à payer que la somme de 12.556,25 F non contestée comme telle, ainsi que les intérêts légaux à compter du jour du jugement du Tribunal de 1ère Instance (4 janvier 1978);

ATTENDU que l’appel doit être rejeté en principe et que les défendeurs et appelants ne pourront être reçus que dans leur demande sub¬sidiaire qui ne mène qu’à une réduction du montant à payer d’environ 1/6, il paraît équitable que les frais et dépens soient répartis dans la proportion de 1/6 à la charge de la demanderesse et de 5/6 à la charge des défendeurs et appelants in solidum;

PAR CES MOTIFS, et ceux non contraires des premiers juges:

La Chambre des Appels de la Commission Centrale pour la Navigation du Rhin,

- reçoit en la forme l’appel interjeté;

- infirme partiellement le jugement attaqué et le confirme pour le surplus comme suit:
 
- condamne le PORT AUTONOME DE STRASBOURG et Monsieur Théodore SUTTER, in solidum,
à payer à la Compagnie Française de Navigation rhénane la somme de 12.556,25 F avec les intérêts légaux à compter du 4 janvier 1978;

- condamne les défendeurs-appelants in solidum à payer 5/6 et la demanderesse- intimée à payer 1/6 des dépens de la procédure des instances; ces dépens sont à liquider, conformément à l’article 39 de la Convention révisée pour la Navigation du Rhin, par le Tribunal pour la Navigation du Rhin de Strasbourg.