Rechtsprechungsdatenbank

181 C - 11/86 - Berufungskammer der Zentralkommission (Berufungsinstanz Rheinschiffahrt)
Entscheidungsdatum: 06.06.1985
Aktenzeichen: 181 C - 11/86
Entscheidungsart: Urteil
Sprache: Französisch
Gericht: Berufungskammer der Zentralkommission Straßburg
Abteilung: Berufungsinstanz Rheinschiffahrt

CHAMBRE  DES APPELS DE LA COMMISSION CENTRALE POUR LA NAVIGATION  DU RHIN

ARRÊT

du 06.06.1985

(rendu en appel d’une ordonnance du Président du Tribunal pour la Navigation du Rhin de Strasbourg du 3 septembre 1984 - 3 C 2/80 )

FAITS ET PROCEDURE:

1. Dans la nuit du 31 mai 1977, un ensemble formé par des automoteurs et barges "V I" "V" et "P", gui s’étaient ancrés le long de la rive Ouest du Grand Canal d’Alsace, en face du Canal de force motrice menant à l’usine hydraulique de Gerstheim, a chassé et a dérivé; il a heurté et endommagé le pont qui a été construit par EDF dans le cadre de la concession qui a été accordée à cet établissement public par Décret du 20 mai 1971.
 
2. Par exploit délivré le 14 mars 1980, la société VIC S.A. a assigné EDF devant le Tribunal pour la Navigation du Rhin de Strasbourg pour voir:

"dire et juger que E.D.F. n’a introduit,à ce jour, aucune  action en réparation du dommage consécutif à la collision  survenue   le   31   mai   1977";

" constater  qu’est   inexistante ,   subsidiairement  prescrite   et   très   subsidiairement   limitée   à   la   valeur   du   V   I   la   créance   prétendue   d ’E.D.F.   à   l’encontre   de   la  société  VIC  S.A.,    très    subsidiairement "     qu’elle   ne   saurait   excéder   la   valeur   du   couple   et   du   fret    au  moment   de   l’accident";

"condamner E.D.F. à payer la somme de 50.000 F aux titres de  frais,  démarches   et   débours   injustifiés".

3.Par acte du 9 avril 1980, EDF s’est constitué devant le Tribunal pour la Navigation du Rhin de Strasbourg.

Par acte du 21 mai 1980, la société VIC S S.A. a signifié à E.D.F. qu’elle se désistait de l’instance.

5.Par acte du 5 juin 1980, EDF a signifié à la société VIC S.A. copie de son mémoire en date du 4 juin 1980, adressé au Tribunal pour la Navigation du Rhin de Strasbourg le même jour, et dont les conclusions sont ainsi conçues:

"Rejeter   la   demande   de   V";

"Dire   et  juger  qu’aucune   prescription  ne   saurait   en   l’état être   opposée   à   EDF";

"Donner  acte   à   EDF   de   ce   qu’il   entend "recouvrer   contre   la   société   V   le   montant   du  préjudice   subi   à   la   suite   de   l ’accident   survenu   à   GG  le   31   mai   1977";

"Condamner  sur   le   fondement   de   l’article   700   du   Nouveau   Code  de   procédure   civile   la   société   V   à  payer  à  EDF  une   indemnité   de   50.000  F";

"Condamner   la   société   V  en   tous   les   frais   et   dépens".

6. A l’audience du 17 novembre 1980, la société VIC a répété oralement qu’elle se désistait de l’instance. EDF n’a pas accepté le dé¬sistement et a pris les conclusions de son mémoire du 4 juin 1980.
 
-  Par jugement du 12 janvier 1981, le Tribunal pour la Navigation du Rhin de Strasbourg a rejeté les conclusions de désistement de la demanderesse, a constaté que la prescription a été interrompue par la signification des conclusions d’intervention en date du 24 mai 1978, en la procédure de contravention de grande voirie engagée devant le Tribunal Administratif, a donné acte à EDF de ce qu’il entend recouvrer contre la société V le montant du préjudice subi à la suite de l’accident survenu à GERSTHEIM le 31 mai 1977, a con-damné la demanderesse à payer à EDF la somme de 2.000 F (deux mille francs) par l’application de l’article 700 du Nouveau Code de procédure civile, et a condamné la demanderesse aux dépens.

8. Sur appel de la société VIC S.A., la Cour d’Appel de Colmar, siégeant en tant que Tribunal d’Appel pour la Navigation du Rhin a, le 1er juin 1981, déclaré l’appel recevable et bien fondé, a mis à néant le jugement entrepris et, statuant à nouveau, a constaté que la société VIC s’est valablement désistée de l’assignation qu’elle a fait délivrer le 14 mars 19 80 à EDF, a déclaré en conséquence l’instance éteinte à la date de la notification de l’acte de désistement, a dit que les frais de l’instance éteinte jusqu’au désistement sont à charge de la société VIC, a condamné l’EDF aux dépens résultant du jugement ainsi qu’aux dépens de l’instance d’appel et a débouté  les parties du surplus de leurs demandes, fins et conclusions, contraires ou plus amples.

9.- Le 10 décembre 1981, la société VIC a rédigé une requête en taxation adressée au Secrétaire-greffier du Tribunal pour la Navigation du Rhin de Strasbourg.

La société VIC y ajouta un mémoire daté du 11 décembre 1981 établissant les frais et dépens taxables à 59.504,28 F.

La lettre précitée et les mémoires précités furent déposés au Greffe du Tribunal d’Instance de Strasbourg le 14 décembre 1981.

La société VIC déclara dans sa lettre du 10 décembre 19 81 estimer la valeur du différend concernant la validité du désistement de la société VIC, auquel E.D.F. s’opposait, à 100.000 F,
 
par voie d’analogie conformément à l’arrêt de la 2ème Chambre civile de la Cour d’Appel de Colmar du 18 septembre 1981 (II W 1098/81).

La société VIC ajouta que "La demande reconventionnelle de première instance qui a un objet différent   de la validite du désistement, a pour valeur le montant de la créance réclamée par E.D.F., soit  8.085.000  F, de sorte que la valeur  en litige de première instance s’élève au total à  8.185.000  F".

La société VIC précisa que l’instance d’appel a les mêmes objets et les mêmes valeurs en litige. Dans ses conclusions du 21 décembre 1981, déposées au Greffe du Tribunal d’instance de Strasbourg le 23 décembre 1981, EDF reprenait les termes de l’exploit d’assignation délivré le 14 mars 1980 à la requête de la société VIC à savoir:

"S’entendre   E.D.F.   condamner   en   tous   les   frais   et   dépens  dont   distraction   au  profit   de   Mes   E.   et  A.  G..."

"S’entendre EDF condamner à payer la somme de 50.000 F avec intérêts de droit à dater du jugement à inter venir ";

"Dire   et   juger  qu’ E.D.F.   n’a   introduit,   à  ce   jour,   aucune action   en   réparation   du   dommage   consécutif  à   la   collision survenue   le   31   mai   1977  entre   l’ensemble   "V   I"   "P"   et   les   installation   d’E.D.F.   à   Gerstheim.;

"Constater   qu’est- inexistante,   subsidiairement   prescrite   et "très   subsidiairement limitée,   à   la   valeur  du    "V   I",    la "créance   prétendue   d’E.D.F.   à   l’encontre   de   l ’exposante,   très  subsidiairement  qu’elle   ne   saurait   excéder   la   valeur   du "couple et   du  fret  au  moment   de   l’accident".

Pour   en déduire  que la somme réclamée par la société VIC était de 50.000 F.

Reprenant ses conclusions du 4 juin 1980, E.D.F. constatait qu’il est borné à demander au Tribunal de:

- "rejeter   la   demande   de   V ";

- " dire   et   juger  qu’aucune   prescription   ne   saurait   en   l’état   être   opposée   à   E.D.F.";
 
 
-" donner  acte   à  E.D.F.   de   ce   qu’il   entend  recouvrer   contre   la   société   V   le montant   du  préjudice   subi   à   la   suite  de   l’accident   survenu   à   GERSTHEIM  le 31   mai   1977 ";

-"  Condamner  sur   le   fondement  de   l’article   700   du   N.C.P.C.   la   société   V   à payer   à  E.D.F.   une   indamnité   de  50.000  F;

-"  Condamner   la   société   V  en   tous   les   frais   et   dépens".

E.D.F. en conclue qu’aucune demande reconventionnelle n’existait et que la valeur du litige ne saurait être supérieure à 50.000 F,’ soit le montant sollicité par la société V dans son assignation.

11.- Par sa réponse du 5 janvier 1982 la société VIC maintint qu’il existaitune demande reconventionnelle comme l’avait constaté la Cour d’Appel de Colmar siégeant en tant que Tribunal d’Appel pour la Navigation du Rhin dans son arrêt du 1er juin 1981 (p. 4) et que par cette demande l’intérêt du litige que E.D.F.

Antendait faire trancher par le Tribunal pour la Navigation du Rhin et la Cour d’Appel, en méconnaissance du désistement de la demande principale, "tendait   à  établir   l’existence de   la  créance   en   réparation qu’elle   revendiquait   à   la   suite   de   l’accident, en faisant expressément   constater   qu’elle   n’était  pas   prescrite.   Ladite   créance   ayant une   valeur   de   8.085.000  F   c’est   ce   montant qui   constitue   la   valeur  de   la demande   reconventionnelle."

Dans sa réponse du 13 janvier 1982 EDF précisa qu’il n’avait pas demandé que V soit condamnée à lui verser le montant principal  de son préjudice et ceci pour la bonne raison qu’une autre juridiction, le Conseil d’Etat, était saisie de cette demande.

12. Par son ordonnance intermédiaire du 21 décembre 1983, le Greffier du Tribunal pour la Navigation du Rhin de Strasbourg a invité le conseil de la société VIC à présenter une requête en taxation des frais à l’exception des émoluments (droits fixes, proportionnels et gradués).

L’ordonnance intermédiaire était basée sur l’article 39 de la Convention révisée pour la Navigation du Rhin et précisait:

"Attendu   qu’il   résulte clairement   de   cet   article   que   les  émoluments   des   avocats ne   peuvent   être   taxés ".

13. Un pourvoi contre cette décision a été interjeté par VIC S.A. auprès du Tribunal pour la Navigation du Rhin de Strasbourg le 27 décembre 1983, déposé au Greffe du Tribunal d’instance de Strasbourg le 5 janvier 1984.

Il est précisé  dans ce pourvoi que l’article 39 de la Convention révisée pour la Navigation du Rhin dispense exclusivenent les procédures devant les Tribunaux de la Navigation du Rhin des droits, taxes, redevances perçus par les Greffes ou Administrations des Impôts et consacre expressément la légalité de la perception de débours.

Le pourvoi ajoute:

"que   toutefois,   la   Convention  ne   détermine   pas   l ’étendue des   débours   exposés devant   ses   juridictions   en   laissant "le   soin   au   législateur  national,  ainsi   que   le démontre  formellement,  pour   la   détermination  de   ces   frais   et   débours,  les  termes  etc.   Le   tout   d’après   les   tarifs   ordinaires   en   matière   de   procédure".

Le pourvoi se réfère à la décision de la Commission Centrale du Rhin du 19 mai 1894 dans l’affaire GA/H, , jurisprudence de la C.C.R., p, 33 et précise:

"que   les   émoluments   des   avocats,  qui   représentent   les  parties  devant  ces juridictions,  constituent,  en   vertu   du   code   de "procédure   civile   locale,  des  frais réglementés,  au même   titre que   les   indemnités   de   témoins   et   les   rémunérations d’ experts, et  que   leur  répétbilité   est   admise  par   les   dispositions   de procédure locale".

Par son ordonnance du 3 septembre 1984, le Président du Tribunal pour la Navigation du Rhin de Strasbourg a rejeté le recours formé par la société V contre l’ordonnance du Greffier du Tribunal pour la Navigation du Rhin de Strasbourg du 21 décembre 1983, refusant la taxation des émoluments d conseils de la société V et a taxé les frais à rembourser par EDF à la société V à 116,64 F.

La société VIC S.A. a fait appel de cette décision le 18 septembre 1984 auprès de la Commission Centrale pour la Navigation du Rhin.

Dans ses conclusions devant la Commission Centrale pour la Navigation du Rhin EDF souligne que les émoluments d’avocat ont été créés "pour permettre   à   un  plaideur  de récupérer   sur   l ’autre   qui   a  perdu   le   procès   les   frais d’écriture   exposés"  et qu’il s’agit "des   frais   dits  d’avoués en   Vieille   France".
 
EDF rappelle que la Convention de Mannheim dispense expressément les parties de l’usage de papier timbré et en déduit: "qu’on   ne   voit   pas  pour  quelle   raison   la  partie perdante   devrait  payer  des   frais   que   la   Convention  Internationale   a expressément   dispensé   son   adversaire   d’exposer".

EDF soulève dans l’énoncé de ses conclusions un moyen d’incompétence et conclut enfin que la valeur en litige est de loin inférieure à celle fixée par la société VIC et ne peut excéder un montant de 50.000 F.

EXPOSE DES MOTIFS:

Attendu que l’appel interjeté par la société VIC S.A. est régulier en la forme et conforme aux prescriptions de la Convention révisée de Mannheim;

Attendu que le litige a pour objet la taxation des frais et des dépens concernant une procédure dans laquelle la demanderesse en taxation a choisi de se pourvoir en appel auprès du Tribunal Supérieur du pays dans lequel le jugement a été rendu, en application de l’article 37 de la Convention révisée de Mannheim;

Attendu que la demande en taxation des frais et des dépens est connexe à la procédure à laquelle s’appliquent les frais et les dépens dont la taxation est demandée; que le Tribunal pour la Navigation du Rhin qui a statué sur la procédure ayant entraîné les frais et les dépens dont la taxation est demandée est compétent à connaître de la demande en taxation; que de même, l’instance qui, en application de l’article 37 de la Convention révisée de Mannheim, a statué sur l’appel ans la procédure qui a entraîné les frais et les dépens dont la taxation est demandée, est compétente à connaître de l’appel de la décision du Tribunal pour la navigation du Rhin concernant la taxation;

Attendu que l’appel du jugement du 12 janvier 1981 du Tribunal pour la Navigation du Rhin de Strasbourg, ayant été porté par la société VIC S.A. devant la Cour d’Appel de Colmar, en application de l’article 37 de la Convention révisée de Mannheim, seule la Cour d’Appel de Colmar était compétente à connaître du pourvoi immédiat contre la décision du Tribunal pour la Navigation du Rhin de Strasbourg concernant la taxation des frais;

Attendu que la Chambre des Appels de la Commission Centrale pour la Navigation du Rhin est dès lors sans compétence pour prendre connaissance de l’appel de l’ordonnance du 3 septembre 1984 du Président du Tribunal pour la Navigation du Rhin de Strasbourg concernant la requête en taxation des frais et des dépens;
 
PAR CES MOTIFS:

et ceux non contraires du premier Juge LA CHAMBRE DES APPELS

- se déclare incompétente à connaître de l’appel de la société VIC S.A.;

- déclare irrecevable cet appel, en déboute l’appelante et la condamne aux frais de la procédure en taxation;

- dit que les frais sont à liquider conformément au présent arrêt et aux lois de la procédure civile française par le Tribunal pour la Navigation du Rhin de Strasbourg